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Contribuer aux opérations de secours en Türkiye après le tremblement de terre

Marc Nas, responsable des opérations et chef de groupe adjoint du Service de Secours et du Feu du CERN, nous parle de sa mission d'appui à l'aide internationale

Marc Nas (centre) and his team in Türkiye

Marc Nas (au centre) et son équipe en Turquie

Le 6 février 2023, à 4 h 17 du matin, heure locale, la Türkiye et la Syrie étaient frappées par un séisme de magnitude 7,8 sur l'échelle de Richter. Au 26 février 2023, plus de 51 000 décès étaient confirmés (plus de 44 300 en Türkiye et plus de 6 700 en Syrie). La catastrophe a suscité un élan de solidarité à travers le monde, qui a permis d'apporter aux équipes de secours sur place, débordées, aide et soutien de toute sorte.

L'un de nos collègues du CERN, Marc Nas, responsable des opérations et chef de groupe adjoint du Service de Secours et du Feu du CERN, s'est rendu sur les lieux de la catastrophe. Depuis 2015, il participe au mécanisme de protection civile de l'Union européenne, mis en place en 2001 par la Commission européenne pour renforcer la coopération entre les pays en vue d’améliorer la prévention, la préparation et la réaction face aux catastrophes.

Le mécanisme a été activé juste après le séisme et Marc a été choisi pour être le chef d'équipe adjoint de l'équipe de protection civile de l'Union européenne. Cet entretien a été réalisé à son retour d'une mission de trois semaines dont le but était de coordonner l'aide d'urgence de l'Union européenne avec le gouvernement turc.

Comment avez-vous été amené à participer à cette mission ?

Je suis formé à la recherche et au sauvetage en milieu urbain (RSMU), à la réponse aux catastrophes, à la gestion d'équipes de crise et à la coopération civilo-militaire. De 2003 à 2017, j'ai été chef d'état-major de l'équipe néerlandaise de recherche et de sauvetage en milieu urbain. À ce titre, j'ai participé à plusieurs exercices internationaux avec les Nations Unies et l'Union européenne et pris part aux opérations de secours menées lors des tremblements de terre qui ont frappé le Maroc, Haïti et le Népal. J'ai rejoint le mécanisme de protection civile de l'Union européenne en 2015 en tant que chef d'équipe, après avoir suivi les exercices et cours de formation réguliers afin de pouvoir être prêt et immédiatement opérationnel en cas de nouvelle situation d'urgence. Lorsque le séisme a secoué la Türkiye et qu'un appel aux volontaires a été lancé, je n'ai pas hésité. Ma hiérarchie au CERN m'a soutenu et je lui en suis très reconnaissant.

Pouvez-vous nous dire ce que vous avez trouvé à votre arrivée et quelles ont été les premières mesures que vous avez dû prendre ?

Je suis arrivé en Türkiye deux semaines après le séisme. J'étais basé à Gaziantep, à la tête d'une équipe de l'Union européenne composée de 12 personnes travaillant aux côtés de collègues des Nations Unies dans une zone sinistrée trois fois plus grande que les Pays-Bas, allant de Malatya à Hatay et d'Adiyaman à Adana. Je n'avais jamais connu une catastrophe d’une telle ampleur auparavant. Les besoins étaient gigantesques ! À Gaziantep, curieusement, les dégâts étaient relativement peu visibles lorsque je suis arrivé. Mais il suffisait de s'éloigner en direction du nord-est ou du sud-ouest, à quelques heures de route, pour constater les dégâts considérables, surtout dans les grandes villes.

Quel était le profil de l'équipe que vous deviez diriger ?

Notre équipe comptait neuf nationalités et était composée d'experts de divers domaines, tels que l'aide médicale, la logistique, la sûreté et la sécurité, et la gestion de l'information. Nous avons pris la suite de l'« équipe Alpha » ; le passage de relais s'est fait en une journée. Nous nous sommes mis au travail immédiatement aux côtés des autres agences humanitaires, des organisations des Nations unies et des autorités locales afin d'apporter toute l'aide possible. J'ai dû travailler en étroite collaboration avec mon homologue des Nations Unies, qui se trouvait être néerlandais et vivre dans le Pays de Gex. Le contact a donc été fort, dès le début.

Comment s'est déroulé le travail dans un contexte aussi difficile ?

J'ai dû faciliter la coordination de l'aide reçue des États membres de l'Union européenne et d'autres pays participant au mécanisme. Nous avons également aidé les autorités nationales, en lien avec nos collègues des Nations Unies, pour évaluer et suivre la situation, et identifier les domaines où l'assistance était la plus urgente. Le travail a été rendu plus difficile par les répliques et les tempêtes, qui ont provoqué des inondations dans des zones déjà dévastées. J'ai également été frappé par la forte implication de nombreux pays : des hôpitaux de campagne mis en place par la Belgique, la France, l'Italie et l'Espagne, des bateaux venant d'Italie et des avions en provenance de toute l'Europe et du reste du monde. Et ce, alors que les organisations humanitaires sont déjà largement sollicitées par le conflit en cours en Ukraine et d'autres urgences !

Que retenez-vous de cette expérience unique ?

Je suis très reconnaissant envers le CERN de m'avoir soutenu et d'avoir fait preuve d'autant de souplesse. Je reviens ici avec tellement d'expériences, d'images, de souvenirs, de liens et d'enseignements. J'ai été le témoin direct de l'engagement et de la solidarité de la communauté internationale pour aider la Türkiye. J'ai reçu des commentaires très positifs de la part de mes collègues de l'Union européenne et des Nations Unies sur ma manière de travailler et ma personnalité, qu'ils décrivent comme détendue, amicale et professionnelle. C'est ce qui m'a permis de nouer des relations et des liens avec mes collègues, les habitants et les populations concernées. Voir les ONG à l'œuvre et l'ampleur de la réponse de la communauté internationale était impressionnant. Ainsi, le Turkménistan a monté un hôpital de campagne ; l'Égypte a envoyé des bateaux et l'Indonésie des avions. Le monde entier s'est mobilisé.
J'ai toujours aimé diriger des opérations et, grâce à cette expérience, je suis prêt à aller plus loin : je me sens maintenant capable d'assumer le rôle de chef d'une « première équipe » lors de prochaines opérations.

Propos recueillis par l'unité HSE