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Imagerie spectroscopique par rayons X : feu vert pour une utilisation médicale

Les ateliers du CERN sur les applications médicales des détecteurs spectroscopiques de rayons X ont joué un rôle clé dans les progrès accomplis en matière d'imagerie spectroscopique par rayons X

Medipix3 ASIC connected to a CdTe sensor
Un gros plan de la puce Medipix3 ASIC connectée à un capteur en tellurure de cadmium. Le CdTe est très efficace pour absorber les rayons X dans la gamme d'énergie utilisée pour l'imagerie médicale de diagnostic. (Image: Advacam Oy)

Le sixième atelier sur les applications médicales des détecteurs spectroscopiques de rayons X a actuellement lieu au CERN. Lancé en 2011 et se déroulant tous les deux ans, cet atelier réunit des spécialistes de différentes disciplines dans le but d'améliorer cette nouvelle technique d'imagerie et de faire progresser les connaissances dans ce domaine. Également connue sous le nom d'« imagerie par comptage photonique », l'imagerie spectroscopique par rayons X rend la tomodensitométrie possible en couleur. Cette année assistent à l'atelier plus de 100 participants (cliniciens, radiologues, médecins, biologistes, développeurs de traceurs, spécialistes des systèmes d'imagerie et développeurs de circuits ASIC et de détecteurs), venant de grands fournisseurs d'équipements médicaux, de start-up, d'hôpitaux de recherche de renommée mondiale ou encore de petits groupes universitaires très actifs.

« Il y a 11 ans encore, la faisabilité technique et l'intérêt clinique de l'imagerie spectroscopique par rayons X faisaient beaucoup de sceptiques, rappelle Michael Campbell, porte-parole des collaborations Medipix au CERN. Le CERN est le plus grand laboratoire de physique du monde. Il possède des capacités de pointe en microélectronique et en détecteurs de particules, ainsi qu'une longue tradition de collaboration scientifique à l'échelle mondiale. Ces atouts font du CERN le lieu idéal pour organiser un atelier de ce genre. Les ateliers du CERN ont contribué à la cristallisation d'idées et à la formation d'une communauté dynamique de spécialistes convaincus du potentiel de la technologie ».

Onze ans plus tard, les spécialistes célèbrent une étape importante pour la technologie : en 2021, un scanner à comptage photonique élaboré par Siemens a reçu l'homologation de l'Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA), qui l'a décrit comme « le premier progrès d'envergure accompli dans le domaine de la tomodensitométrie depuis près de dix ans. » Il s'agit du premier scanner utilisant l'imagerie spectroscopique par rayons X officiellement homologué pour un usage médical courant dans le monde. « Les ateliers du CERN ont contribué pour beaucoup dans le progrès de cette technologie et à son transfert du laboratoire à la clinique, explique Dushyant Sahani, intervenant principal et président du département de radiologie à l'Université de Washington. L'imagerie spectroscopique par rayons X devrait révolutionner l'imagerie médicale : elle fournit de meilleures images alors que le patient reçoit une dose de radiation moins importante, ce qui permet d'adopter de nouvelles méthodes de travail optimisant les précieuses ressources des hôpitaux. »

Encore plus proche du CERN, le scanner couleur 3D à rayons X pour l'imagerie du poignet de MARS Bioimaging est en attente d'une homologation en vue de premiers essais cliniques au Centre hospitalier universitaire lausannois (CHUV), en Suisse. Il fait déjà l'objet d'essais cliniques au Pacific Radiology Group, plus grand centre d'imagerie médicale de Nouvelle-Zélande. Le CERN et l’entreprise néo-zélandaise MARS Bioimaging collaborent depuis 2008 afin de développer un scanner couleur 3D à rayons X basé sur la technologie Medipix3.

« Une grande partie de la technologie qui rend possible l'imagerie spectroscopique par rayons X provient de la recherche fondamentale, notamment de la R&D sur les détecteurs menée dans le cadre d'expériences en physique des hautes énergies, raconte Giovanni Anelli, chef du groupe Transfert de connaissances du CERN. Le CERN mène une politique de transfert des connaissances proactive et je suis fier du rôle joué par les participants au projet Medipix et par nos partenaires commerciaux dans l'invention de l'imagerie spectroscopique par rayons X haute résolution. »

Pourquoi les détecteurs spectroscopiques de rayons X représentent-ils une technologie particulièrement révolutionnaire ?

Les faisceaux de rayons X utilisés dans les équipements médicaux comportent un large spectre d'énergies, que l'on peut se représenter comme différentes couleurs de rayons X. Dans les détecteurs classiques, l'image prise est basée sur l'énergie totale des rayons X absorbée par chaque pixel, ce qui forme une image en noir et blanc. Les détecteurs spectroscopiques, quant à eux, permettent de produire des images contenant également les « couleurs » des rayons X émis. Les images sont donc de meilleure qualité et plus nettes, et sont obtenues à des doses optimales, ce qui représente un avantage considérable lors du diagnostic. Dans certaines circonstances, l'IRM (imagerie par résonnance magnétique) pourrait même devenir superflue. Dans d'autres cas encore, lorsque des agents de contraste métalliques attachés à des biomarqueurs sont injectés dans le corps, les scanners utilisant la tomographie par émission de positions combinée à la tomodensitométrie (PET-CT), qui sont coûteux, pourraient être évités.

Le concept de l'utilisation de l'énergie des rayons X a d'abord été appliqué à la tomodensitométrie spectrale (TDM double énergie). Avec cette technique, deux images sont prises l'une après l'autre à des voltages différents appliqués à un tube de rayon X (kVp). Comme chaque image a un niveau moyen d'énergie différent, elles peuvent être combinées pour former des images plus nettes que celles produites en une seule prise. Cependant, il est nécessaire de décider de l'utilisation de la TDM double énergie avant que le patient ne reçoive un scanner, et cette technique est utilisée uniquement en cas de nécessité, car elle implique généralement pour le patient une dose de radiation plus importante.

Les détecteurs spectroscopiques, quant à eux, fournissent beaucoup plus d'informations que la TDM double énergie. Une seule image est prise. Il n'est pas nécessaire de prendre de décision en amont et le patient n'est pas exposé à une dose supplémentaire, les informations sur les niveaux d'énergie étant disponibles en permanence.

 

Si vous souhaitez un résumé de l'atelier 2022, ne manquez pas la retransmission sur le web de la présentation d'Anthony Butler (MARS Bioimaging) le vendredi 2 septembre à 11 heures (CET). L'enregistrement sera mis à disposition par la suite. 

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Pour d’autres informations sur l'atelier ou sur les collaborations Medipix, contactez Michael Campbell à l'adresse Michael.Campbell@cern.ch.